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samedi 1er février 2025
Je crains que, faute d’une solution pour en...
( 16 janvier 2025 )

Je crains que, faute d’une solution pour en limiter le nombre, les musées ne soient conduits un jour à interdire l’usage des smartphones dans les salles d’exposition. A Orsay, hier, chacune des toiles de l’expo Caillebotte n’était visible qu’à travers un rideau serré de bras brandissant des dizaines d’écrans, et les tableaux de grande dimension ne pouvaient être observés que le nez sur la toile. Malgré la file d’attente à l’entrée des salles pour réguler l’afflux, on naviguait avec peine au sein d’une foule compacte. Malgré tous ces inconvénients (dus peut-être à ce que nous étions dans les derniers jours), nous avons pris un très grand plaisir à découvrir des dizaines d’œuvres que nous ne connaissions pas (ou seulement sur photos), issues de collections particulières et de tous les grands musées du monde. Les deux pièces maitresses qui demeurent à Orsay, la Gare Saint-Lazare et les raboteurs de parquet, sont accompagnées d’une multitude de croquis et de toiles préparatoires. Nous n’avions pas vu d’expo de cette qualité depuis celle consacrée à Herbin au musée de Montmartre, et si Caillebotte figure depuis longtemps au panthéon de nos artistes préféré, elle nous a offert de nouvelles raisons de l’admirer. Bruno qui nous accompagnait dans cette visite partage notre jugement, ce qui n’est pas toujours le cas, et opère le même rapprochement que nous avec la peinture de D. Hockney.
En revanche il ne partage visiblement pas notre goût pour les frères Campana, écartant notre suggestion de déjeuner dans leur Café pour nous entraîner au Danton le bistro sinistre où il a ses habitudes, boulevard Saint germain, où nous avons mangé un mauvais alligot, coincés contre une table minuscule. Sur le trajet pour nous y conduire, comme nous cherchions à repérer l’emplacement de la galerie Denise René, il nous a avoué que ce nom lui était inconnu.
Revu ensuite, hier soir, le très beau film de Stephen Frears, Philomenia (2013), où Judi Dench incarne une femme à la recherche du fils qu’adolescente, les religieuses de son orphelinat lui ont enlevé pour le vendre. J’y découvre une analyse politique dont je ne me souviens pas m’être aperçu à la première vision : A travers des dialogues magnifiquement écrits, on comprend que l’écart entre le journaliste pétri de références littéraires et cette femme sans culture dont l’univers se borne aux préjugés religieux qui l’ont détruite ne sera jamais comblé. Tout conduit à cette évidence que le déterminisme social trace dès le plus jeune âge le destin et les limites du futur adulte, surtout s’il s’y joint précocement le poison de la pensée religieuse. A cet égard le retour massif des religions auquel on assiste dans la vie publique constitue sans doute, autant que les dérives du climat, le risque majeur qui nous menace.