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samedi 1er février 2025
Ce sera ma concession aux traditions de la...
( 1er janvier 2025 )

Ma concession aux traditions du nouvel an : la résolution, que j’espère suivre, de nourrir ce journal quotidiennement, ou tous les deux jours au moins. Il est vrai que je peux avancer une excuse pour le retard accumulé : le Covid qui s’est invité pour Noël, nous a beaucoup fatigués l’un et l’autre, et commence tout juste de refluer.
Nous avons dû reporter le déjeuner de fêtes prévu ce samedi avec Bruno, Tuan et Patrick. La semaine dernière, nous avions déjeuné avec ce dernier chez Malika et Pierre-Yves, que nous retrouvions avec plaisir, entourés de leurs trois fils, dont nous ne connaissions pas l’aîné. Michel V. n’étant pas de la partie cette fois-ci, nous avons pu vérifier la règle que relate C. Lanzmann à propos de ses relations avec Sartre et S. de Beauvoir : on ne discute bien qu’avec ceux avec lesquels on est d’accord sur le fond. Nous avons pris un vrai plaisir à évoquer l’actualité, les films et nos lectures, et sommes repartis en fin d’après-midi avec le sentiment rassurant de n’être pas seuls à échapper à la folie collective qui semble s’emparer du monde.
Ce cataclysme global, qui aux Etats-Unis pousse les noirs, les femmes et les pauvres à élire Trump, et en Europe à voter pour des partis fascistes, se répand partout comme une nuée toxique qui contamine les esprits. Les réseaux sociaux, que N. Klein compare à des graffitis laissés dans des toilettes mondiales, sales et surpeuplés en sont à l’évidence le principal vecteur. Évidence d’autant plus flagrante depuis qu’E. Musk en a pris le contrôle, avec le dessein assumé d’en faire l’instrument d’une guerre idéologique. Cela me rappelle la sinistre formule de Sida mental imaginée par L. Pauwells dans les années 80, quand il prétendait (comme le fait M.V. aujourd’hui) que les idées de gauche colonisaient les esprits. A cette époque (celle de Reagan et Thatcher, qui diabolisaient le Sida) la métaphore était nauséabonde, car elle était aussi une insulte faite aux malades, mais sans doute était-elle prophétique ?
Ce Covid mental, qui pousse chacun à proférer des avis et des convictions en toute matière, nous aurait-il déjà tous contaminés ? C’est la question que je me pose à propos de l’affreux fait divers qui a donné lieu, la semaine dernière, à un traitement médiatique quelque peu délirant : Le conducteur d’un TGV s’est donné la mort en sautant de son train, entrainant l’arrêt brutal de la rame et celui de toute circulation sur l’axe Nord-Sud. Un tel suicide, évènement sans précédent jusque-là, ne change rien au réflexe habituel des chaînes de TV qui multiplient aussitôt les interviews de voyageurs, furieux d’avoir raté leur réveillon. A quoi répond la Com’ de la SNCF, en inspirant une série de sujets sur l’infaillible sécurité des TGV. Enfin, dans un troisième temps, la CGT des cheminots saisit à son tour les médias pour rendre hommage à leur collègue, insinuant peu ou prou que ses dures conditions de travail pouvaient expliquer son geste, alors que nul n’en sait rien, mais qu’on apprend au passage qu’à 53 ans, il était tout près de la retraite... Un simple fait divers, dont on ne sait quasiment rien, déclenche instantanément un déluge d’interprétations contraires, basées sur les convictions de chacun. Celle des usagers, victimes de la dérive mercantile d’une entreprise publique qui ne tient plus son rôle, et qui détestent de plus en plus l’entreprise et ses employés. Et celle des syndicats, obstinés à défendre un statut spécial qui ne fait pas des cheminots les travailleurs les plus mal lotis.
Quant au drame d’un homme habité d’un tel désespoir, il fera le miel des magazines people.