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dimanche 21 avril 2024
Mémoires de l’inachevé
par Grisélidis Réal
( 2 décembre 2011 )

Je n’ai pas, moi, cette désinvolture élégante qui permet de passer par quelque pirouette légère d’un amour à un autre, d’un mensonge à un autre... Hélas, moi, je suis de celles qui sont blessées longtemps. [p .194]

(...) quant à son papa et à sa maman, il faut proprement les assassiner en soi et hors de soi et se libérer des toutes ces défenses et ces tabous imbéciles qu’ils nous ont criminellement ingurgités dès la première enfance. Il faut dire MERDE une fois pour toutes à tout ce qui n’est pas flamboyante volupté, caresses à l’infini et de toutes sortes en utilisant et en glorifiant tous les moindres recoins du corps et de l’âme. [p.214]

Et l’arme la plus puissante, il ne faut pas l’oublier, c’est le sourire, oui un sourire, qu’est-ce qu’on peut contre çà ? D’un sourire on aplatit le monde comme une crêpe ! [p.235]

Oui, qu’on abatte les taules à la dynamite ! Qu’on brûle les uniformes ! Qu’on crève les murs, les serrures, les portes ! L’homme n’a plus le droit de porter le nom d’homme tant qu’il tient son frère enfermé. Tant qu’il le torture, lui prend sa liberté, lui mutile le cœur, le sexe et le cerveau !
Que celui qui porte un uniforme se l’arrache du corps et le jette loin de lui comme une lèpre !
Brûlez les règlements ! Foutez à la poubelle vos casquettes et vos armes ! Sortez vos cœurs Nom de Dieu, tendez les bras, ouvrez les mains ! [p.309]

A nous qui n’avons que nos corps, les flics ne nous ont rien pris, rien donné. Notre unique prison, c’est l’amour. Par les barreaux de nos bras, nous sommes enfermés, séquestrés pour l’éternité.
Le geôlier invisible qui nous a réunis a égaré la clé... Nos caresses volées, plus personne ne peut nous les prendre, et ce butin caché vous ne l’aurez pas. C’est notre bagne à nous, notre jardin de pavots éclatants qui brûle vos asiles, qui dévore vos uniformes, qui réduit en poussière vos règlements de fer et fait exploser vos couilles mortes : L’AMOUR - le nôtre, l’amour des fous, des parias et des criminels.
Vos dossiers, on s’en torche le cœur. Gardez vos mairies, vos papiers, vos officiers, vos églises, vos signatures et vos expertises psychiatriques... vos orgues plantez-les vous bien profond dans l’anus, et châtrez vous en musique, éjaculez au son du cor, fouettés par de vieux drapeaux bouffés aux mites, la verge enserrée de l’anneau nuptial gravé à vos initiales, copulez et chiez à l’ombre des cantiques, enculez-vous aux râles d’une harpe phtisique et faites des gosses à votre image : déjà émasculés, et tout emmaillotés d’avance dans l’uniforme, graine de flics et de soldats. Ces gosses-là se feront délinquants pour mieux vous abattre comme des hyènes su le cadavre de vos monuments-aux-morts. Vous puez Messieurs, vos palais sont des morgues et vos commissariats des charniers où la barbaque de vos têtes se débite à coups de tampon , à coup de piston... A coups de flonflons anémiques, à coups de verges mécaniques et de fiches anthropométriques.

Un jour, une nuit, nous serons mariés, sans papiers, et sans procédure, par l’unique magie du reflet de la lune sur nos corps nus dans le sable, unis par la mer et le vent, et la musique des arbres.
Je n’irai plus à l’aube en taxi te chercher tout au fond du brouillard pour te trouver transi dans ton veston d’été devant les portes de la taule, seul, n’ayant pas dormi ni mangé, malade, l’estomac bourré de tranquillisants qui te feront vomir au premier verre de vin et empoisonneront nos caresses.
Cette nuit-là, le CONGE sera perpétuel... [p.318]