L’interprétation est un hommage de la médiocrité au génie. [p. 16]
En des temps fort lointains - disons que ce fut le cas pour Dante - on a pu voir des tentatives révolutionnaires de réalisation d’œuvres d’art ouvertes à différents niveaux de compréhension. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Ce que nous voyons s’imposer de plus en plus, comme la grande pitié de notre temps, c’est la creuse redondance du commentaire. [p.21]
[Nous pouvons] apprécier, sans aucun scrupule de conscience, des œuvres qui, à s’en tenir simplement à leur « contenu », nous paraîtraient d’une moralité contestable. (...) Les abus de la propagande nazie ne nous empêcheront pas d’estimer que le Triomphe de la volonté et les Olympiades de Leni Riefenstahl sont de très grands films. [Ils] dépassent les simples perspectives de la propagande et du reportage du fait qu’ils dépeignent la complexité des mouvements de l’intelligence, la grâce et la beauté des gestes. Le génie de réalisateur de Riefenstahl fait que le « contenu », en dépit de ses intentions sans doute, s’efface devant la beauté formelle. Une œuvre d’art, en sa qualité d’œuvre d’art - et en dépit même des intentions de l’artiste - n’est jamais au service d’une cause. [p. 36]
Il faut prendre ce que je dis dans son sens littéral, il faut que l’on se rende compte que notre époque est réellement une époque criminelle. Mon œuvre entière a pris pour cible ceux qui volontairement ou par stupidité pure s’efforcent de faire sauter la planète ou la rendre inhabitable. Comme tous ceux qui travaillent dans la publicité, (...) je sais qu’il faut manipuler avec précision le mot et l’image si je veux pouvoir modifier la perspective consciente de mon lecteur.
[Citation de William Burroughs, p.110]