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lundi 30 septembre 2024
Il me faut revenir sur mes lectures des...
( 7 septembre 2024 )

Il me faut revenir sur mes lectures des dernières semaines et ma digestion douloureuse des deux nouveaux livres d’Aurélien Bellanger, dont je suis venu à bout au prix d’un effort surhumain, accompli au nom de l’estime que je lui portais jusqu’ici, muée désormais en réelle aversion. Les derniers jours du Parti socialiste, dont le lancement donne lieu à une énorme campagne de presse et de commentaires -dont j’ai compilé ici et ici quelques exemples - est à mes yeux son plus mauvais livre, à égalité avec Le musée de la jeunesse, dont je parlerai ensuite. C’est en vain que j’ai tenté d’y retrouver les qualités qui m’avaient tant plu dans L’aménagement du territoire et Le Grand Paris, où il brossait déjà -surtout dans le deuxième - un portrait cruel et drôle du monde politique et de ses arcanes.
La déception est d’autant plus grande que j’adhère à son analyse politique sur la responsabilité de la gauche dans l’essor de l’idéologie fasciste : Le mouvement du Renouveau républicain, en radicalisant son combat pour la laïcité, a en effet rejoint la croisade de FN contre l’"islamo-gauchisme" que dénoncent sans cesse ses représentants ultra-médiatisés comme Fourest ou Val.
Mais l’insupportable réside dans le procédé narratif utilisé pour exposer cette thèse : une sorte de contrefaçon historique qui met en scène des personnages réels (ou en tout cas immédiatement identifiables) à qui on prête des propos, des échanges et des comportements imaginaires (souvent vraisemblables, mais en tout cas jamais appuyés sur des documents ou des témoignages), à seule fin de démontrer la pertinence de la thèse défendue. On en éprouve un profond malaise - dû à la malhonnêteté du procédé -qui culmine dans les dernières pages où l’auteur se met lui-même en scène de manière grotesque dans le rôle de Sauveterre, qui meurt en martyr, victime d’un attentat.
Et au malaise né du procédé narratif, s’ajoute pour le lecteur l’agacement provoqué par un style plus boursoufflé que jamais, fait de phrases interminables, bourrées de parenthèses parfois emboîtées. L’avalanche incessante de métaphores pédantes et de rapprochements historiques brillants, destinée à nous rendre éblouir par tant d’intelligence et de culture, révèle finalement de manière cruelle l’auto-satisfaction démesurée de son auteur.
Pour en finir avec Bellanger (car hélas, c’est bien ce dont il s’agit pour moi), son opuscule Le musée de la jeunesse, ouvrage de commande qui inaugure une collection sur le thème des musées, confirme son obsession de l’auto-célébration, qui atteint là un sommet de cuistrerie. Triste d’observer le naufrage d’un auteur aussi doué, victime de la griserie du succès.