Le jugement d’Irina, hier, sur le film de Guillaume Gallienne (et le reproche qu’elle m’a fait d’avoir cru qu’il pouvait lui plaire, comme si j’avais abusé de sa confiance en l’envoyant voir un porno) confirme le malaise qui s’est installé dans notre relation avec elle. J’avais éprouvé la même impression une première fois il y a quelques mois, quand elle nous avait rendu indignée le DVD de « The history boys » en disant qu’elle avait failli vomir, et nous regardant de travers pour avoir pris plaisir à une œuvre aussi malsaine. Hier, le jugement était du même ordre, et Gallienne à ses yeux est un malade. Elle s’est même avancée jusqu’à supposer que Didier, qui n’a pas encore vu le film, partagera son avis, et elle me consigne seul dans le rôle du pervers. Si Didier ne m’avait pas maîtrisé, j’aurais vraiment rompu les ponts séance tenante. Il a eu raison, bien sûr, surtout par égard pour Marie-Claire, qui perçoit parfaitement le problème et doit être douloureusement partagée. Mais il faut bien admettre que notre relation avec Irina a changé du tout au tout. Je n’ai désormais pour ma part plus la moindre spontanéité en sa présence, je n’imagine plus lui faire la moindre confidence, et pour tout dire je n’ai plus de plaisir à la voir, tant je redoute sans cesse un esclandre. J’ai perdu une amie.
La fracture a commencé d’apparaître de façon manifeste à propos du mariage pour tous, quand elle a tâté le terrain pour savoir si nous approuvions vraiment la loi, et à travers une anecdote qu’elle nous a alors relatée : Celle d’une mère découvrant l’homosexualité de son fils qui vient de mourir du sida en rencontrant pour la première fois son compagnon lors de l’enterrement. Sa compassion allait bien sûr à la mère, tellement proche de son fils qu’elle ignorait tout de sa vie...